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Le Pape retrace son voyage en Asie et en Océanie et invite à une réflexion moins «eurocentrique»

L'«air du printemps» de l’Eglise missionnaire du bout du monde

 L'«air du printemps»  de l’Eglise missionnaire  du bout du monde  FRA-038
19 septembre 2024

Chers frères et sœurs, bonjour!

Aujourd’hui, je parlerai du voyage apostolique que j’ai effectué en Asie et en Océanie. On l’appelle voyage apostolique parce qu’il ne s’agit pas d’un voyage touristique, mais d’un voyage pour apporter la Parole du Seigneur, pour faire connaître le Seigneur, et aussi pour connaître les âmes des peuples. Et c’est très beau.

C’est Paul vi, en 1970, qui a été le premier Pape à s’envoler vers le soleil levant, visitant longuement les Philippines et l’Australie, mais s’arrêtant aussi dans plusieurs pays d’Asie et à Samoa. Et ça a été un voyage mémorable. Car le premier à quitter le Vatican fut saint Jean xxiii qui se rendit en train à Assise; puis saint Paul vi fit ceci: un voyage mémorable! J’ai es-sayé de suivre son exemple, mais, avec quelques années en plus, je me suis limité à quatre pays: l’Indonésie, la Papouasie-Nouvelle-Guinée, le Timor oriental et Singapour. Je remercie le Seigneur qui m’a permis de faire en tant que vieux Pape ce que j’aurais aimé faire en tant que jeune jésuite, parce que je voulais aller en mission là-bas!

Une première réflexion qui vient naturellement après ce voyage, c’est qu’en pensant à l’Eglise, nous sommes encore trop eurocentriques, ou, comme on dit, «occidentaux». Mais en réalité, l’Eglise est beaucoup plus grande, bien plus grande que Rome et de l’Europe, bien plus grande, et — je me permets de le dire — plus vivante dans ces pays. J’en ai fait l’expérience de manière émotionnante en rencontrant ces communautés, en écoutant les témoignages des prêtres, des religieuses, des laïcs et surtout des catéchistes — les catéchistes sont ceux qui mènent à bien l’évangélisation. Des Eglises qui ne font pas de prosélytisme, mais qui grandissent par «attraction», comme le disait avec sagesse Benoît xvi.

En Indonésie, les chrétiens sont environ 10%, et les catholiques 3%, une minorité. Mais j’ai rencontré une Eglise vivante, dynamique, capable de vivre et de transmettre l’Evangile dans ce pays à la culture très noble, enclin à harmoniser la diversité, et qui compte en même temps le plus grand nombre de musulmans au monde. Dans ce contexte, j’ai eu la confirmation que la compassion est le chemin sur lequel les chrétiens peuvent et doivent marcher pour témoigner du Christ Sauveur et en même temps rencontrer les grandes traditions religieuses et culturelles. En ce qui concerne la compassion, n’oublions pas les trois caractéristiques du Seigneur: la proximité, la miséricorde et la compassion. Dieu est proche, Dieu est miséricordieux et Dieu est compatissant. Si un chrétien n’a pas de compassion, il ne sert à rien. «Foi, fraternité, compassion» était le thème de la visite en Indonésie: à travers ces mots, l’Evangile entre chaque jour, concrètement, dans la vie de ce peuple, en l’accueillant et en lui donnant la grâce de Jésus mort et ressuscité. Ces mots sont comme un pont, comme le passage sous-terrain qui relie la cathédrale de Jakarta à la plus grande Mosquée de l’Asie. Là j’ai vu que la fraternité est l’avenir, qu’elle est la réponse à l’anti-civilité, aux complots diaboliques de la haine et de la guerre, également du sectarisme. Il y a la fraternité, la fraternité.

J’ai trouvé la beauté d’une Eglise missionnaire, en sortie, en Papouasie-Nouvelle-Guinée, un archipel qui s’étend vers l’immensité de l’océan Pacifique. Là, les différentes ethnies parlent plus de huit cents langues: un environnement idéal pour l’Esprit Saint, qui aime faire résonner le message d’Amour dans la symphonie des langues. Ce n’est pas de l’uniformité, ce que fait le Saint-Esprit, c’est de la symphonie, c’est de l’harmonie, il est le «patron», il est le chef de l’harmonie. Là, d’une manière particulière, les protagonistes ont été et sont encore les missionnaires et les catéchistes. J’ai été heureux de pouvoir passer un peu de temps avec les missionnaires et les catéchistes d’aujourd’hui, et j’ai été ému d’écouter les chants et la musique des jeunes: en eux, j’ai vu un nouvel avenir, sans violence tribale, sans dépendance, sans colonialismes idéologiques ou économiques; un avenir de fraternité et d’attention à l’environnement naturel merveilleux. La Papouasie-Nouvelle-Guinée peut être un «laboratoire» de ce modèle de développement intégral, animé par le «levain» de l’Evangile. Car il n’y a pas d’humanité nouvelle sans hommes et femmes nouveaux, et ceux-ci le Seigneur seul les fait. Et je voudrais aussi mentionner ma visite à Vanimo, où les missionnaires sont entre la forêt et la mer. Ils vont dans la forêt à la recherche des tribus les plus cachées… Un beau souvenir, celui-là.

Le pouvoir de promotion humaine et sociale du message chrétien se manifeste de manière particulière dans l’histoire du Timor oriental. L’Eglise y a partagé le processus d’indépendance avec tout le peuple, en l’orientant toujours vers la paix et la réconciliation. Il ne s’agit pas d’une idéologisation de la foi, non, c’est la foi qui devient culture et en même temps l’éclaire, la purifie et l’élève. C’est pourquoi j’ai relancé la relation féconde entre foi et culture, sur laquelle le Pape saint Jean-Paul ii. La foi doit être inculturée et les cultures évangélisées. Foi et culture. avait déjà mis l’accent lors de sa visite. Mais j’ai surtout été frappé par la beauté de ce peuple: un peuple éprouvé mais joyeux, un peuple sage dans la souffrance. Un peuple qui non seulement engendre tant d’enfants — il y avait énormément d’enfants —, mais leur apprend à sourire. Je n’oublierai jamais le sourire des enfants de ce pays, de cette région. Les enfants sont toujours souriants là-bas, et ils sont nombreux. Ce peuple leur apprend à sourire, et c’est une garantie pour l’avenir. Bref, au Timor oriental, j’ai vu la jeunesse de l’Eglise: des familles, des enfants, des jeunes, de nombreux séminaristes et aspirants à la vie consacrée. Je voudrais dire, sans exagérer, j’ai respiré «l’air du printemps»!

La dernière étape de ce voyage a été Singapour. Un pays très différent des trois autres: une cité-état, très moderne, pôle économique et financier de l’Asie et bien au-delà. Les chrétiens y sont minoritaires, mais ils forment une Eglise vivante, engagée à générer l’harmonie et la fraternité entre les différentes ethnies, cultures et religions. Même dans la riche Singapour, il y a des «petits» qui suivent l’Evangile et deviennent sel et lumière, témoins d’une espérance plus grande que celle que les gains économiques peuvent garantir.

Je voudrais remercier ces peuples qui m’ont accueilli avec tant de chaleur, tant d’amour. Je voudrais remercier leurs gouvernements, qui ont -beaucoup aidé à cette visite, afin qu’elle puisse se dérouler de manière ordonnée, sans problèmes. Je remercie tous ceux qui y ont collaboré. Je rends grâce à Dieu pour le don de ce voyage! Et je renouvelle ma gratitude à tout le monde. Que Dieu bénisse les peuples que j’ai rencontrés et les guide sur le chemin de la paix et de la fraternité! Je vous salue tous.

A l'issue de l'audience générale, le Pape a prononcé les appels suivants:

Ces derniers jours, de fortes pluies torrentielles se sont abattues sur l'Europe centrale et orientale, faisant des victimes, des disparus et des dégâts considérables. L'Autriche, la Roumanie, la République tchèque et la Pologne en particulier doivent faire face aux tragiques perturbations causées par les inondations. J'assure chacun de ma proximité, en priant spécialement pour ceux qui ont perdu la vie et pour leurs familles. Je remercie et encourage les communautés catholiques locales et les organisations bénévoles pour l'aide et le secours qu'elles apportent.

Samedi prochain, le 21 septembre, aura lieu la Journée mondiale de la maladie d'Alzheimer. Prions pour que la science médicale puisse bientôt offrir des perspectives de guérison de cette maladie, et pour que des mesures de plus en plus appropriées soient prises pour soutenir les malades et leurs familles.

Et puis, chers frères et sœurs, prions pour la paix: n'oublions pas que la guerre est une défaite. N'oublions pas la Palestine, Israël, n'oublions pas l'Ukraine martyrisée, la Birmanie et tant d'endroits où il y a des guerres, de vilaines guerres. Que le Seigneur donne à chacun un cœur qui cherche la paix pour vaincre la guerre, qui est toujours une défaite.

Je vous donne à tous ma bénédiction.

Parmi les pèlerins qui assistaient à l'audience du 18 septembre, se trouvait les groupes francophones suivants:

De France: groupe de pèlerins du diocèse de Bordeaux; groupe de la paroisse de Cazères; groupe de pèlerins de Tullins.

Je salue cordialement les pèlerins de langue française, en particulier la communauté tsigane et la Fédération internationale des universités catholiques. Que le Christ nous enseigne à marcher chaque jour sur le chemin de la compassion pour rejoindre nos frères et sœurs de cultures et de religions différentes et œuvrer pour l'harmonie et la fraternité en incarnant l'Evangile dans le concret de nos vies. Que Dieu vous bénisse.